Depuis le départ de Médecins Sans Frontières (MSF), la ville de Baraka traverse une crise sanitaire sans précédent, selon les témoignages recueillis auprès de M. Alain Likumbe Umbelwa, anesthésiste à Baraka.
Chaque jour, la population paie le prix fort de ce retrait, dans l’indifférence quasi générale des autorités et des élites locales.
Contacté par la rédaction de Fizinews24.info,
Mussa Ali Rutamu, coordinateur provincial du Mouvement Citoyen Machozi ya Rahiya (MCMR-RDC), a alerté que les cas de décès se multiplient de manière dramatique. Pour une majorité de citoyens à faibles revenus, l’accès aux soins de santé est devenu un luxe inaccessible. Face à cette situation, de nombreuses personnes se tournent vers l’automédication, une pratique dangereuse qui figure, selon l’OMS, parmi les principales causes de surdosage mortel – après les maladies cardiovasculaires et le cancer, a-t-il déclaré.
Faute d’hôpitaux fonctionnels et de personnel qualifié, certains citoyens tentent leur chance auprès d’infirmiers de quartier, souvent livrés à eux-mêmes, sans formation suffisante ni moyens de diagnostic. Récemment, un enfant a perdu la vie à la suite d’une anémie non détectée.
« Cet enfant aurait pu devenir médecin, agronome, un espoir pour son quartier, pour la ville de Baraka. Il est parti dans le silence, victime d’un système de santé défaillant », a-t-il ajouté.
Même ceux qui parviennent à atteindre les hôpitaux se heurtent à un manque criant d’équipements et de protocoles adaptés. Des patients en soins intensifs sont déjà décédés à cause de pannes d’oxygène, dans des établissements qui ne disposent ni de bonbonnes de secours ni de groupes électrogènes fiables. Les concentrateurs d’oxygène disponibles ne délivrent que 15 L/min, largement insuffisants pour les cas graves nécessitant plus de 30 L/min.
Les interventions chirurgicales sont souvent réalisées par des médecins généralistes, sans spécialistes ni matériel adéquat. Dans certains cas, le service d’anesthésie est inexistant : aucun système de ventilation mécanique, aucun moniteur de surveillance vitale, aucun respirateur. Une simple complication devient une condamnation à mort.
Les lits de soins intensifs permettant des positions vitales comme Fowler, semi-Fowler ou Trendelenburg sont inexistants. Ces positions, pourtant recommandées dans les cas de détresse respiratoire, d’AVC ou en post-opératoire, sont essentielles. Le contraste est saisissant : ces équipements sont déjà utilisés dans les hôpitaux d’Uvira, de Bukavu ou de Goma, mais à Baraka, ils brillent par leur absence.
Le transfert des patients se fait parfois à dos d’homme, à vélo ou sur des brancards de fortune. Dans ces conditions, l’espérance de survie devient un pari contre le destin.
Le départ de MSF a mis en lumière le vide abyssal laissé par un système de santé abandonné. Malgré la présence de la diaspora, de politiciens, d’investisseurs et de leaders communautaires, la situation ne cesse d’empirer. Le silence des autorités, l’inaction des élites et le désengagement des partenaires ne font qu’aggraver l’urgence.
Le MCMR-RDC appelle à une réponse immédiate :
1. La mise en place d’un plan d’urgence sanitaire pour Baraka, avec des équipements adaptés et du personnel qualifié.
2. La mobilisation de la diaspora, des élus et des partenaires techniques et financiers pour pallier le vide laissé par MSF.
3. La responsabilisation des autorités sanitaires locales face aux morts évitables et à l’effondrement des soins de santé de base.
« Baraka ne doit pas devenir un cimetière de l’indifférence. Chaque vie perdue faute de soins est un drame évitable. Trop, c’est trop ! »
Salumu Msafiri Modeste